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Vue de Téhéran en 2025
Reza Pahlavi

Qui est Reza Pahlavi, le prétendant au Trône du Paon ?

par Chamsin, publié le 23 juillet 2025

Dans l'ombre de la tumultueuse géopolitique moyen-orientale contemporaine, une figure se distingue par son héritage autant que par son ambition politique : Reza Pahlavi, descendant direct de la dynastie qui régna sur l'Iran de 1925 à 1979. Entre nostalgie monarchique et aspiration démocratique, cet homme de soixante-quatre ans incarne aujourd'hui l'une des voix les plus visibles de l'opposition iranienne en exil.

Né le 31 octobre 1960 à Téhéran, Reza Cyrus Pahlavi voit le jour dans les fastes d'un Empire perse à son apogée. Fils aîné de Mohammad Reza Pahlavi, le dernier shah d'Iran, et de l'impératrice Farah Diba, il grandit dans les palais dorés de la capitale iranienne, destiné à ceindre un jour la couronne impériale. Sa naissance représente alors l'assurance dynastique tant espérée, garantissant la perpétuation de la lignée Pahlavi après les deux précédents mariages infructueux de son père.

L'enfance dorée du jeune prince héritier s'achève brutalement le 16 janvier 1979, lorsque la révolution islamique contraint la famille impériale à prendre le chemin de l'exil. À dix-huit ans, Reza Pahlavi découvre l'amertume de l'errance, parcourant avec sa famille l'Égypte, le Maroc, les Bahamas, le Mexique et finalement les États-Unis. Cette pérégrination forcée forge le caractère d'un homme qui ne foulera plus jamais le sol de sa patrie natale.

Le destin politique de Reza Pahlavi se précise tragiquement le 27 juillet 1980, lorsque son père succombe au cancer au Caire. Conformément à la constitution impériale de 1906, devenue caduque mais symboliquement respectée par les royalistes, il prête serment le 31 octobre 1980, jour de son vingtième anniversaire, se proclamant empereur d'Iran de jure sous le nom de "Reza II". Cette investiture fantôme, célébrée au palais de Koubbeh en Égypte, marque le début d'un règne en exil qui perdure depuis plus de quatre décennies.

Un engagement politique multiforme dans l'opposition

L'action politique de Reza Pahlavi s'articule autour du Conseil national iranien, organisation qu'il fonde en 2013 et qui rassemble monarchistes, paniraniens, sociaux-libéraux et anciens réformistes du mouvement vert. Cette coalition hétéroclite témoigne de sa volonté de transcender les clivages idéologiques traditionnels de l'opposition iranienne, fragmentée entre plus de trente-cinq partis politiques en exil. Néanmoins, cette diversité constitue également une faiblesse, Kenneth Katzman soulignant la "faible activité" du Conseil et "l'amenuisement de ses soutiens" quelques années après sa création.

La stratégie politique du prétendant au trône oscille entre restauration monarchique et promotion démocratique. S'il se proclame officiellement "shah d'Iran", Reza Pahlavi adopte paradoxalement un discours républicain, prônant l'organisation d'un référendum libre pour permettre au peuple iranien de choisir la nature de son futur régime. Cette posture ambiguë reflète les contradictions d'un homme tiraillé entre légitimité dynastique et nécessité pragmatique d'élargir sa base de soutien.

L'engagement international de Reza Pahlavi se manifeste particulièrement dans ses relations avec les États-Unis et Israël. En 2023, il effectue une visite historique en Israël, rencontrant le Premier ministre Benjamin Netanyahu et établissant des contacts avec l'establishment sécuritaire israélien. Cette démarche s'inscrit dans sa vision géopolitique d'un Iran réconcilié avec l'État hébreu, évoquant la figure de Cyrus le Grand qui libéra les Juifs de Babylone. Ses prises de position pro-israéliennes lui valent cependant de vives critiques au sein de la diaspora iranienne, certains analystes le qualifiant de "toutou de Netanyahu".

Les tragédies familiales et leur impact politique

L'histoire de la famille Pahlavi en exil est marquée par une série de drames qui ternissent l'image dynastique et affectent profondément l'action politique de Reza Pahlavi. Le 10 juin 2001, sa sœur cadette Leila, âgée de trente et un ans, est retrouvée morte dans sa chambre de l'hôtel Leonard à Londres, victime d'une overdose de barbituriques. Mannequin pour Valentino, diplômée de l'université Brown, la princesse Leila souffrait de dépression chronique, d'anorexie et de troubles alimentaires, séquelles psychologiques de l'exil précoce et de la perte du père.

Reza Pahlavi, fils du dernier Shah, incarne la nostalgie monarchiste d'une partie de la diaspora iranienne, mais son influence réelle à l'intérieur du pays reste incertaine. La plupart des Iraniens n'ont pas connu l'ère prérévolutionnaire et le pays a profondément changé depuis 1979. L'Organisation des Moudjahidines du Peuple (MEK), dirigée par Maryam Rajavi à travers le Conseil National de Résistance de l'Iran, souffre quant à elle du lourd passif de sa collaboration avec l'Irak de Saddam Hussein durant la guerre Iran-Irak.

Dix ans plus tard, le 4 janvier 2011, c'est au tour d'Ali-Reza Pahlavi, frère cadet de Reza, de mettre fin à ses jours par arme à feu dans son appartement de Boston. Diplômé de Princeton et d'Harvard, cet intellectuel discret de quarante-quatre ans était rongé par la nostalgie de l'Iran et la culpabilité de l'exil. Sa compagne Raha Didevar, enceinte de cinq semaines au moment du suicide, donnera naissance à Iryana Leila Pahlavi, unique enfant posthume de la lignée.

Ces tragédies familiales fragilisent la position politique de Reza Pahlavi, interrogeant sur la capacité d'une dynastie endeuillée à incarner l'espoir national. L'impératrice Farah Diba, aujourd'hui âgée de quatre-vingt-six ans et résidant entre Paris et Washington, porte le deuil de ces deux enfants perdus, symboles d'une génération sacrifiée sur l'autel de l'Histoire.

L'héritier face aux défis contemporains

Le mouvement de protestation consécutif à la mort de Mahsa Amini en septembre 2022 constitue un tournant dans l'engagement politique de Reza Pahlavi. L'arrestation et le décès suspect de cette jeune Kurde de vingt-deux ans, victime de la police des mœurs pour "port inapproprié du voile", embrase l'Iran et offre au prétendant une opportunité inédite de se positionner en leader de l'opposition. Participant aux veillées de la diaspora à Washington, Reza Pahlavi capitalise sur ce mouvement pour renforcer sa légitimité politique.

Ses récentes déclarations lors de l'offensive israélienne contre l'Iran en juin 2025 illustrent sa stratégie d'instrumentalisation des crises géopolitiques. Appelant à un "soulèvement national" et à la "désobéissance civile", il exhorte les Iraniens à profiter de l'affaiblissement du régime pour "prendre leur destin en main". Cette rhétorique belliqueuse témoigne d'une radicalisation de son discours, désormais ouvertement favorable à un changement de régime par la force.

La dimension familiale de son engagement se matérialise également à travers son épouse Yasmine Etemad-Amini, juriste de formation née en 1968 à Téhéran et exilée enfant aux États-Unis. Mariés depuis 1986, le couple princier a trois filles : Noor (née en 1992), Iman (1993) et Farah (2004), toutes nées sur le sol américain et représentant une génération d'héritiers sans attache directe avec l'Iran historique. Ces princesses de la diaspora incarnent paradoxalement l'américanisation progressive d'une dynastie perse millénaire.

L'influence géopolitique de Reza Pahlavi s'exerce principalement à travers ses relais institutionnels américains et ses connexions avec les think tanks néoconservateurs de Washington. Résidant dans le Maryland, il entretient des rapports étroits avec l'establishment sécuritaire américain et plaide pour une politique de "pression maximale" contre le régime de Téhéran. Cette stratégie d'alliance avec les puissances occidentales lui vaut néanmoins d'être perçu par certains analystes comme un "instrument de l'étranger" plutôt qu'un leader authentiquement iranien.

En sommme

Dans les méandres de l'opposition iranienne fragmentée, Reza Pahlavi demeure une figure ambivalente, tiraillée entre héritage monarchique et ambition démocratique, entre légitimité dynastique et pragmatisme politique. Son parcours illustre les paradoxes d'une génération d'exilés contrainte de réinventer son identité loin de la terre natale, portant sur ses épaules le poids d'une histoire interrompue et l'espoir d'une restauration hypothétique. Les tragédies familiales qui jalonnent son existence rappellent cruellement que l'exil, fût-il doré, demeure une blessure béante pour quiconque a connu la gloire et la chute. Comme l'écrivait Marguerite Yourcenar dans ses "Mémoires d'Hadrien", "Il n'est peut-être pas d'autre paix, pour l'homme, que celle qu'il se forge lui-même", sentence qui résonne singulièrement avec le destin de cet empereur sans empire, roi sans royaume, dont l'existence même questionne la pérennité des dynasties face aux convulsions de l'Histoire.


Sources